Chronique historique 7 | Les grands bateaux blancs de la CTMA : Un véritable symbole de fierté

Le Lucy Maud Montgomery a été au service pendant 22 ans. Le Madeleine I aura duré 24 ans. Les deux navires sont arrivés aux Îles avec un âge déjà avancé. Avec toutes leurs compétences et leur fierté, les équipages de la CTMA leur ont donné une seconde vie. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on les a bien entretenus pour qu’ils soient au service des Madelinots pendant si longtemps. 

Du Madeleine I au Madeleine II : des navires imposants qui frappent l’imaginaire

« Quand le Madeleine I est arrivé aux Îles, ç’a frappé l’imagination de beaucoup de monde aux Îles. C’était énorme comparé au Lucy Maud. » (Raphaël Turbide, CFIM)

Pour beaucoup de gens, en voyant ce grand bateau (capacité de 200 voitures vs 100 avec le Lucy Maud), on se disait que c’était beaucoup trop gros pour les Îles. « Jamais ils ne rempliront ça ! » se disaient les uns, « Ils sont tombés sur la tête, un pareil bateau pour les Îles », disaient les autres ! 

Pourtant, au fil du temps, la demande était là. Le Madeleine a eu un impact important sur l’achalandage touristique et a contribué à amener les Îles à un autre niveau. C’est à cette époque qu’on a développé un tourisme plus organisé, avec un réseau de services, d’hébergement et beaucoup de promotion de la destination des Îles. Résultat : on accueille des clientèles plus diversifiées. La destination n’attire plus seulement le touriste bohème en sac à dos ou encore la diaspora madelinienne. Les horizons sont élargis, les opportunités se multiplient et les Îles atteignent tranquillement l’achalandage de 60 000 visiteurs et plus. 

Deux décennies plus tard, le Madeleine montre son âge. Les bris mécaniques sont de plus en plus fréquents, les réparations sont coûteuses et l’approvisionnement en pièces est difficile. La fiabilité du service est compromise. Il importe aussi de suivre un développement touristique exponentiel. Comme dans les années 1990, le remplacement des navires de la CTMA prend des tournures politiques. Revient alors la question éternelle : construction neuve ou achat d’un navire usagé ? Le parallèle est frappant. Les mêmes débats reprennent, c’est une question d’investissement financier majeur, mais aussi de partage des pouvoirs et des responsabilités, de changement de gouvernement, etc. À l’été 2020, la décision est prise par le gouvernement fédéral de construire un nouveau traversier neuf, déjà baptisé le Jean-Lapierre, qui viendrait éventuellement prendre la relève ici aux Îles. 

« Entre temps, le Madeleine était vraiment en fin de vie et malgré tout le brio des mécaniciens de la CTMA, il y avait une limite aux miracles que ceux-ci pouvaient accomplir ! Donc pour assurer la fiabilité et la sécurité, il fallait remplacer le navire rapidement.» (Raphaël Turbide, CFIM)

L’expérience de la CTMA dans la prospection de navires disponibles sur le marché européen a été mise à profit, car on a rapidement déniché un traversier presque neuf (2018) qui répondait en tous points aux besoins des Madelinots. Les équipes de la CTMA ont su faire avancer le dossier de manière efficace et importer rapidement le navire, assurant ainsi la poursuite de leur mission d’assurer un service essentiel à la population. 

Un traversier moderne qui fait contraste avec les vieux navires du passé 

Pour la toute première fois, les Madelinots accueillent un navire qu’on peut qualifier de neuf. Par une belle journée ensoleillée le 23 mars 2021, ce grand bateau de 139 mètres fait son entrée dans le port de Cap-aux-Meules en arborant déjà les couleurs de la CTMA, sous le regard de milliers de Madelinots bien fiers.  

« Aujourd’hui, le navire est gros, très gros pour la taille du quai. On était là à son arrivée, malgré la pandémie on voulait assister à ce moment historique. C’était spectaculaire ! On a vu rapidement que c’est tout un défi pour le faire tourner dans le port de Cap-aux-Meules. Ça montre que l’évolution continue ! » (Raphaël Turbide, CFIM)

Au fil de l’arrivée de bateaux toujours plus gros, les défis logistiques se ressemblent. Cela nécessite de se pencher sur la question des infrastructures, notamment la refonte du port de Cap-aux-Meules. Il y a toujours l’équilibre entre le cargo et les passagers, mais s’ajoutent aussi des défis liés à l’évolution même de l’archipel. Ces années-ci, on parle beaucoup d’équilibre du développement touristique en termes de nombre et de qualité. À ce niveau, la CTMA joue un rôle important en ce qui concerne la façon de gérer cette capacité supplémentaire, par exemple en termes de réservations, de nombre de traversées et d’accessibilité pour les Madelinots. 

Aujourd’hui, l’empreinte environnementale du navire est également un aspect important, on est à une époque où on se doit d’augmenter nos exigences environnementales. En étant presque neuf, le Madeleine II est doté de technologies récentes lui permettant une grande efficacité énergétique ainsi qu’un fort potentiel d’amélioration continue. 

L’expertise de gens d’ici 

Il est important de parler de l’héritage collectif inestimable des gens aux commandes de ces grands bateaux blancs, qui en 50 ans de traverse, ont prouvé leur expertise et leur grand savoir-faire. 

« Une bonne illustration de tout ce savoir-faire, ce sont les manœuvres pour accoster le Madeleine II dans le port de Cap-aux-Meules, d’arriver avec un navire de 139 mètres et de réussir à l’opérer dans les infrastructures actuelles malgré les défis. Même en ne connaissant pas grande chose, on voit que le tout se mesure dans la haute précision, c’est tout à l’honneur des capitaines et des équipes de navigation de la CTMA. » (Raphaël Turbide, CFIM)

En 50 ans, l’expertise s’est non seulement créée, mais elle s’est transmise. On voit aujourd’hui de jeunes équipages bien formés et possédant les compétences pour être aux commandes des navires, suivant ainsi les traces des bâtisseurs de cette expertise locale. 

Et pour l’avenir ? 

Le service de traversier a un passé, mais il a aussi, et surtout, un avenir. Les défis viennent avec le développement des Îles, avec la façon dont sera pensé le développement touristique dans une approche durable et intégrée. « Pour l’avenir, on a la chance d’avoir un outil stratégique local qui est la CTMA, qui reste entre les mains de la population des Îles. Encore aujourd’hui, c’est un des grands moteurs de l’économie madelinienne. Si on veut bien préparer notre avenir collectif, on sait qu’on a la CTMA qui fait partie de nos atouts et qu’on a de beaux outils pour faire face aux défis de l’avenir! »

« À voir la fierté madelinienne à la réception de ce nouveau bateau [le Madeleine II], on va se souhaiter un autre 50 ans de traverse ! »

– Pierre Aucoin, CFIM

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